Limiter le réchauffement à «1,5°C est une limite, pas un objectif»: des grandes entreprises comme Ikea ou Microsoft ont appelé ce samedi les gouvernements à respecter leurs engagements dans la lutte contre le changement climatique.
L’appel a été signé par 200 entreprises (Bayer, EDF, H&M, Ikea, Microsoft, Nestlé, Saint-Gobain, Unilever, Volvo…), dont certaines issues de secteurs pointés pour leur impact environnemental négatif, ou institutions comme la Chambre de commerce internationale. «Nous avons besoin que les gouvernements, à commencer par les économies les plus avancées du monde, maintiennent leur engagement à limiter le réchauffement à 1,5°C et à agir rapidement pour le mettre en œuvre», indique cette déclaration. «C’est une initiative importante qui souligne que nous devons considérer 1,5° non comme un objectif ou quelque chose de vague mais comme la limite pour un monde vivable», a déclaré devant des journalistes l’ancienne présidente irlandaise, Mary Robinson, qui dirige les «Sages», un groupe fondé par Nelson Mandela réunissant d’anciens responsables œuvrant pour la paix dans le monde.
L’accord de Paris de 2015 vise à limiter le réchauffement de la planète bien en deçà de +2°C et si possible +1,5°C par rapport à l’ère pré-industrielle. «Cela s’adresse aux gouvernements, ceux ici à la COP qui n’ont pas encore relevé leurs ambitions nationales comme ils l’avaient promis à Glasgow, et en particulier le G20 qui va se réunir la semaine prochaine» à Bali, a expliqué Mary Robinson. « Il est vraiment, vraiment important que les gouvernements commencent à prendre au sérieux leurs responsabilités pour diviser par deux les émissions mondiales d’ici 2030, alors qu’elles augmentent. C’est de la folie!», s’est-elle exclamé. María Mendiluce, directrice générale de la coalition d’entreprises engagées en faveur du climat « We Mean Business », a souligné qu’il était important de conserver un objectif clair de 1,5°C pour orienter le monde des affaires. «Une fois que vous vous êtes fixé un budget et une limite, alors vous pouvez délivrer des résultats», a-t-elle fait valoir.
L’appel de ces entreprises intervient à un moment où les calculs des scientifiques du Global Carbon Project alertent sur le fait que les émissions de CO2 d’origine fossile «devraient augmenter de 1 % par rapport à 2021, pour atteindre 36,6 milliards de tonnes, soit un peu plus que les niveaux de 2019 avant le Covid-19». Cette hausse est portée principalement par l’utilisation du pétrole (+2,2 %), avec la reprise du trafic aérien, et du charbon (+1 %). Les émissions dues au charbon, en décroissance depuis 2014, devraient croitre de 1 % et retrouver voire dépasser leur niveau record de cette année là. L’équipe du GCP, qui rassemble plus de 100 scientifiques de 80 institutions, calcule chaque année les émissions de CO2, ainsi que le «budget carbone» restant, soit la limite supérieure de dioxyde de carbone émis permettant de rester sous une température mondiale donnée.
Cette température est en effet liée à la concentration de ce puissant gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Concentration qui a «augmenté de 51 % depuis le début de l’ère industrielle, quand nous avons commencé à brûler en grande quantité les énergies fossiles», souligne l’étude.
Les scientifiques peuvent ainsi traduire en durée le «budget» restant pour respecter les objectifs de l’accord de Paris, pierre angulaire de la lutte contre le réchauffement. Mais au rythme actuel, il ne reste qu’une chance sur deux de tenir d’ici à 2030 l’objectif le plus ambitieux, à savoir : contenir le réchauffement à 1,5°C. En effet, les émissions de gaz à effet de serre devraient baisser de 45 % à l’horizon 2030 pour avoir une chance d’y parvenir. Or, avec près de +1,2°C de réchauffement déjà enregistré, les catastrophes climatiques se multiplient déjà à travers le monde, comme l’a illustré l’année en cours, avec son cortège de canicules, sécheresses, inondations ou méga-feux…En somme, les perspectives ne sont pas bonnes du tout.
Z.Z.